Loi N°2023-668 du 27 juillet 2023 visant à protéger les logements contre l’occupation illicite

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La loi n° 2023-668 du 27 juillet 2023 visant à protéger les logements contre
l’occupation illicite a été publiée au Journal Officiel le 28 juillet 2023 ; après la
décision du Constitutionnel n° 2023-853 du 26 juillet 2023.

Elle est entrée en vigueur le 29 juillet 2023.

La loi comprend trois chapitres : mieux réprimer le squat (chapitre 1er – articles 1 à 8) ; Sécuriser les rapports locatifs (chapitre 2 : articles 9 à 11) ; Renforcer l’accompagnement des locataires en difficulté (chapitre 3 – articles 12 à 13).

I- MIEUX REPRIMER LE SQUAT (CHAPITRE 1ER – ARTICLES 1 A 8)

La loi durcit les sanctions en cas de squat d’un logement en portant les peines encourues à trois ans de prison et 45 000 euros d’amende (contre un an de prison et 15 000 euros d’amende jusqu’ici).

La loi étend la violation de domicile aux logements inoccupés contenant des meubles.

Pour sanctionner le squat de locaux autres qu’un domicile, la loi crée un nouveau délit « d’occupation frauduleuse d’un local à usage d’habitation ou à usage commercial, agricole ou professionnel » puni de deux ans de prison et de 30 000 euros d’amende.

Ce délit vise aussi les locataires en situation d’impayés de loyer restés dans le logement à l’issue d’un jugement d’expulsion devenu définitif. Ces locataires risquent 7 500 euros d’amende.

Les instigateurs de squats faisant croire qu’ils sont propriétaires des logements encourent une de trois ans de prison et de 45 000 euros d’amende ;

“La propagande ou la publicité” facilitant ou incitant les squats est susceptible d’une peine de 3 750 euros d’amende ;

Le dispositif expérimental de la loi dite “Elan” de 2018, qui permet à des propriétaires de confier temporairement des locaux vacants pour du logement ou de l’insertion social, dans l’attente d’une réhabilitation ou d’une vente, est pérennisé.

II- SECURISER LES RAPPORTS LOCATIFS (CHAPITRE 2 : ARTICLES 9 A 11)

Les dispositions adoptées concernent les baux d’habitation résidence principale.
Clause résolutoire
La clause résolutoire devient obligatoire (loi : art. 9, 1° / loi du 6.7.89 : art. 24, I, al. 1)
La clause résolutoire permet la résiliation de plein droit du contrat en cas d’impayés du dépôt de garantie, de loyer ou de charges aux termes convenus. Jusqu’ici, l’insertion d’une clause résolutoire dans un bail était facultative (cf modèle UNIS) La loi prévoit que dans les baux d’habitation à titre de résidence principale, une clause de résiliation de plein droit pour défaut de paiement de loyer, des charges ou de nonversement du dépôt de garantie doit être prévue de façon systématique. Il convient de préciser qu’il est nécessaire de demander au juge l’acquisition de la clause pour qu’elle produise ses effets.
Suspension des effets de la clause résolutoire et délais de paiement (loi : art. 9, 4° / loi du 6.7.89 : art. 24, VII)
Auparavant, l’octroi de délais de paiement entraînait de façon systématique une suspension des effets de la clause résolutoire. La loi prévoit dorénavant que les effets de la clause résolutoire ne
pourront être suspendus pendant le cours des délais de paiement accordés par le juge que :
– si le juge est saisi d’une demande en ce sens par le bailleur ou par le locataire ;
– ET, à la condition que le locataire ait repris le versement intégral du loyer courant avant la date de l’audience.
Cette suspension prend fin dès le premier impayé ou dès lors que le locataire ne se libère pas de sa dette locative dans les conditions prévues par le plan d’apurement judiciaire.
Réduction des délais de procédure
Suspension de la clause résolutoire, à compter du commandement de payer (loi : art. 10, 5° / loi du 6.7.89 : art. 24, I, al. 1 et al. 3)
La clause résolutoire prévue au contrat ne produit ses effets qu’après un délai de 6 semaines (au lieu de 2 mois précédemment) suivant la signification d’un commandement de payer demeuré infructueux.
Délai entre l’assignation et l’audience (loi : art. 10, I, 6 ° / loi du 6.7.89 : art. 24, III)
Lorsque le tribunal judiciaire est saisi d’une demande d’acquisition de la clause résolutoire pour impayés, l’assignation est notifiée par le commissaire de justice au représentant de l’État dans le département. Le délai minimal entre cette notification de l’assignation et l’audience réduit à 6 semaines (au lieu de 2 mois précédemment).
Harmonisation du seuil de signalement des commandements de payer aux CCAPEX (loi : art. 10, I, 5°, c / loi du 6.7.89 : art. 24, I, al. 10)
Jusqu’à présent, le représentant de l’État dans le département fixait, par arrêté, le montant et l’ancienneté de la dette au-delà desquels les commandements de payer devaient être signalés à la Commission de coordination des actions de prévention des expulsions locatives (CCAPEX).
Désormais, la loi harmoniser sur l’ensemble du territoire le seuil de signalement des commandements de payer par le commissaire de justice à la CCAPEX en faisant référence à deux critères :
– des impayés (loyer ou charges) sans interruption depuis une durée de deux mois ;
– ou lorsque la dette de loyer ou de charges est égale à deux fois le montant du loyer mensuel hors charges.
Ce signalement doit être fait dès lors que l’un des deux seuils est atteint.
Réalisation du diagnostic social et financier (DSF) dès le stade du signalement au CCAPEX (loi : art. 10, I, 5°, d / loi du 6.7.89 : art. 24, I, al. 12)
Dès le signalement du Commandement de payer (CDP) par le commissaire de justice à la CCAPEX, le préfet devra saisir l’organisme compétent désigné par le Plan départemental d’action pour le
logement et l’hébergement des personnes défavorisées (PDALHPD), afin qu’il réalise un Diagnostic social et financier (DSF) pour les locataires ainsi signalés.
Le diagnostic devra être transmis par l’opérateur à la CCAPEX avant l’expiration du délai de six semaines prévues entre l’assignation et l’audience.
Encadrement des modalités de mise en place d’un échéancier de paiement judiciaire (loi : art. 9, 3° et art. 9, 2° / loi du 6.7.89 : art. 24, V et III)
L’octroi par le juge des délais de paiement (jusqu’à trois ans, comme auparavant) pour régulariser la dette locative ne pourra être accordé qu’à deux conditions :
– le locataire doit être en situation de régler sa dette locative ;
– ET, il doit avoir repris le versement intégral du loyer courant avant la date de l’audience.
Expulsion
Nouvelles restrictions pour l’octroi du délai de deux mois à la suite du commandement de quitter les lieux (loi : art. 10, II, 1°
/ CPCE : L.412-1, al. 2)
En principe, lorsque l’expulsion porte sur un lieu habité par la personne expulsée ou par tout occupant de son chef, elle ne peut avoir lieu qu’à
l’expiration d’un délai de deux mois suivant la signification d’un commandement de quitter les lieux.
Le juge peut réduire ou supprimer ce délai, lorsque la procédure de relogement n’a pas été suivie d’effet du fait du locataire (CPCE : L. 412- 1, al. 1er).
La loi complète ces dispositions et prévoit que ce délai de deux mois accordé pour quitter les lieux ne s’applique pas lorsque :
– le juge qui ordonne l’expulsion constate la mauvaise foi de la personne expulsée ;
– les personnes dont l’expulsion a été ordonnée sont entrées dans les locaux à l’aide de manoeuvres, menaces, voies de fait ou contrainte.
Nouveaux cas d’exclusion pour le bénéfice des délais de grâce (loi : art. 10, II, 2°, a, b et 3° et art. 2 / CPCE : L.412-3, al. 3 et
al. 4 et L.412-4)
La loi prévoit qu’en principe, le juge peut accorder des délais (dits de “grâce”) renouvelables aux occupants de lieux habités ou de locaux à usage professionnel dont l’expulsion a été ordonnée judiciairement, chaque fois que leur relogement ne peut avoir lieu dans des conditions normales.
Toutefois, cette possibilité pour le juge d’octroyer des délais de grâce est exclue lorsque :
– le propriétaire exerce son droit de reprise (dans le cadre de l’article 19 de la loi du 1er septembre 1948) ;
– ou lorsque la procédure de relogement n’a pas été suivie d’effet du fait du locataire.
La loi prévoit deux autres cas d’exclusion :
– lorsque le locataire est de mauvaise foi ;
– lorsque l’occupant dont l’expulsion a été ordonnée est entré dans les locaux à l’aide de manoeuvres, menaces, voies de fait ou contrainte.
La loi réduit la durée des délais de grâce (CPCE : L. 412-4). : Elle ne peut être inférieure à 1 mois (au lieu de 3 mois a précédemment) ni supérieure à un 1 an (contre 3 ans auparavant).
Réparation en cas de refus de concours de la force publique (loi : art. 11, 1° / CPCE : L.153-1)
La loi prévoit la publication d’un décret en Conseil d’État visant à préciser les modalités d’évaluation de la réparation due au propriétaire, en cas de refus du concours de la force publique pour
procéder à l’exécution d’une mesure d’expulsion.

III- Renforcer l’accompagnement des locataires en difficulté (chapitre 3 – articles 12 à 13)

Le chapitre 3 comporte des dispositions précisant le rôle des CCAPEX et de la CAF vis-à-vis des locataires en difficulté pour payer leur loyer, dans le cadre des baux de logements loués à titre de résidence principale.

IV- ANALYSE DE LA DECISION DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL DU 26 JUILLET

Le Conseil constitutionnel a été saisi le 27 juin et a rendu sa décision le 26 juillet

Il a déclaré contraire à la Constitution la mesure qui visait à libérer le propriétaire d’un bien immobilier occupé illicitement de son obligation d’entretien et à
l’exonérer de responsabilité en cas de dommage résultant d’un défaut d’entretien de ce bien (art. 7 de la proposition de loi modifiant l’article 1244 du Code civil).
L’article 7 avait été introduit en Commission au Sénat (lire l’amendement), pour contrer un arrêt de la cour de cassation (15/9/2022) qui avait décidé que ” un ancien locataire déchu de tout titre d’occupation par décision judiciaire mais s’étant maintenu dans les lieux a chuté au sol depuis une fenêtre à la suite de la rupture du garde-corps. La Cour de cassation a considéré que les propriétaires étaient responsables du défaut d’entretien et les a condamnés à réparer l’entier préjudice subi par le squatteur.”
L’article 7 prévoyait que : « L’occupation sans droit ni titre d’un bien immobilier libère son propriétaire de l’obligation d’entretien du bien de sorte que sa responsabilité ne saurait être engagée en cas de dommage résultant d’un défaut d’entretien du bien pendant cette période d’occupation. En cas de dommage causé à un tiers, la responsabilité incombe dès lors à l’occupant sans droit ni titre du bien immobilier. (…)»
Le Conseil constitutionnel censure cet article au motif que : « § 66 et. s. notamment : 75. Il résulte de ce qui précède que les dispositions contestées portent une atteinte disproportionnée au droit des victimes d’obtenir réparation du préjudice résultant du défaut d’entretien d’un bâtiment en ruine.”
UNIS avait soutenu cette disposition lors de notre audition au Sénat en date du 17 janvier 2023 car comment obliger un propriétaire à entretenir un bien auquel il n’a pas accès. Le sujet reste ouvert et d’actualité.

V- CONSULTER LES SOURCES

Lire la loi n° 2023-668 du 27 juillet 2023 visant à protéger les logements contre l’occupation illicite
Lire la décision n° 2023-853 du Conseil constitutionnel du 26 juillet
2023

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